Après avoir reçu Escrime Passion de Bruno Manuel dans ma boîte aux lettres il y a quelques mois et l’avoir feuilleté négligemment, je l’avais rangé dans ma bibliothèque sans le lire, préférant éviter une déception qui me paraissait inéluctable. Il y a une semaine, mes yeux se sont arrêtés dessus par hasard et je me suis décidé à lui donner sa chance. Bien m’en a pris, car j’ai eu la surprise de découvrir un excellent livre, très original ; un ouvrage de passionné. Le volume à couverture rigide semble avoir été édité par Prieur fin 1990, après les Championnats du monde de Lyon. Le célèbre fabricant de matériel d’escrime eut vraisemblablement la possibilité de supporter un projet éditorial lors de ses années fastes. D’après les informations que j’ai pu glaner sur Internet, Bruno Manuel est avant tout un photographe, également passionné d’escrime de toute évidence. C’est pourquoi son livre tourne dans une large mesure autour de la photographie de scènes d’escrime moderne. Sur la centaine de pages de l’ouvrage, une quarantaine ne recèlent que des photographies en noir et blanc d’assauts en compétition et quelques photos de très jeunes escrimeurs. Malheureusement, alors que ces clichés sont censés être le point central du livre, la médiocre qualité de l’impression, visible sur la couverture, ne leur rend pas justice et on ne s’y attarde guère (seules deux photos ont retenu mon attention, celle d’un enfant pensif entre deux matchs et une montrant la fabrication d’un masque, certainement dans les ateliers de Prieur). Le plus intéressant, c’est plutôt la partie texte. Pour une fois, il ne s’agit ni d’un manuel (nonobstant le nom de l’auteur), ni d’un livre d’histoire. Le volume rassemble un ensemble de textes de quelques pages, chacun se focalisant sur différents acteurs de l’escrime de la fin des années 80 et synthétisant leur vision et leur philosophie du sport qui est le nôtre. Réellement passionnant. Les personnalités en présence sont, entre autres, le célèbre antiquaire Jacques Castanet, Jean-François Lamour et sa curieuse technique d’entraînement consistant à faire des déplacements dans une piscine en apnée, le fameux, non encore entraîneur de Valentina Vezzali, Giulio Tomassini et d’autres moins connus, de moi tout du moins (un certain François Rostain par exemple, maître d’escrime artistique auprès d’acteurs de théâtre et de cinéma). Un chapitre est également consacré à la maison Prieur et un aux Championnats du monde de Lyon, qui se concentre aussi sur les équipements Prieur. Normal, c’est l’éditeur. Il est intéressant de noter que toutes les pages de textes sont richement illustrées, parfois en couleurs, alors que la partie photographie aurait gagné à avoir un peu plus d’éclat.

J’ai beaucoup utilisé le mot passion et ses dérivés dans cet article, mais, comme l’indique le titre du livre, c’est bien là le but de l’auteur et, pourrait-on dire, de Prieur dans Escrime Passion : transmettre l’amour de l’escrime et la flamme qui brûle dans le cœur des maîtres et des champions. On pourra retenir une anecdote savoureuse, extraite du chapitre consacré à Jean-François Lamour (auteur en outre de la préface du livre), alors au sommet de sa gloire : en fin de carrière sportive, il s’interroge en 1990 au sujet de la suite à donner à sa vie professionnelle. Il est alors kiné et, n’ayant que peu d’intérêt pour la pédagogie, il ne souhaite pas devenir maître d’armes. Si on lui avait dit où il serait une douzaine d’années plus tard, l’aurait-il cru ?…

En un mot, collectionneurs et passionnés, je vous conseille chaudement de lire ce livre. Il est bref, mais mérite que l’on s’y arrête !

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