Littérature et cinéma ont beaucoup, quoiqu’insuffisamment à notre goût, exploité la beauté et les richesses de notre sport. Mais un autre média, encore peu reconnu en tant que forme d’art, a souvent vu ses auteurs emprunter à l’escrime de quoi alimenter leurs œuvres. Il s’agit des jeux vidéo. Il n’existe pas à proprement parler de simulation d’escrime moderne, comme c’est le cas pour le football, le basket ou le tennis. Certains jeux du type Mario et Sonic aux Jeux Olympiques et consorts, utilisant la Wiimote, le Playstation Move ou le système Kinect proposent une épreuve d’escrime (le plus souvent de sabre), mais qui n’a bien sûr rien de subtil et où il est inutile d’être précis. Néanmoins, l’utilisation d’armes blanches est très fréquente dans le monde du jeu vidéo et nombre de personnages vidéoludiques trucident leurs ennemis à coups de glaive, de cimeterre, de hache, de couteau de chasse ou de baïonnette. Malheureusement, dans la plupart des cas, ce n’est pas le joueur qui contrôle véritablement les mouvements de la lame. Il suffit d’appuyer sur la touche ou sur le bouton “Attaque” pour que le héros déclenche sa frappe et aille toucher l’ennemi sans que l’on puisse choisir précisément quel point du corps de ce dernier va être atteint. Bien entendu, les jeux récents permettent tout de même de varier les attaques à l’aide de combinaisons de touches et en donnant la possibilité au joueur d’orienter la lame grâce au pavé directionnel (je parle pour les PCistes). Toutefois, seuls quelques jeux exceptionnels donnent réellement au joueur le sentiment de contrôler pleinement son arme et la position de cette dernière au centimètre près. J’ai plusieurs exemples en tête, mais je vais pour l’heure vous en présenter un. Il s’agit de la série des Jedi Knight, se fondant sur l’univers étendu de Star Wars.

Jedi Knight est une pentalogie de LucasArts, de type FPS/TPS (tir à la première ou à la troisième personne) composée d’une trilogie sortie dans la deuxième moitié des années 90 et d’un diptyque plus récent :

1) Star Wars : Dark Forces (1995).
2) Jedi Knight : Dark Forces 2 (1997).
3) Jedi Knight : Mysteries of the Sith (1998).

4) Jedi Knight : Jedi Outcast (2002).
5) Jedi Knight : Jedi Academy (2003).

C’est aux deux derniers épisodes que nous nous intéresserons ici, dans leur version PC, car ils restent à tous les points de vue tout à fait jouables aujourd’hui (scénario en béton, graphismes qui ne font pas mal aux yeux, compatibilité avec tous les Windows et bien sûr très bonne simulation d’escrime au sabre… laser).

Dans Jedi Outcast, le joueur incarne Kyle Katarn, un ancien jedi devenu mercenaire (ce qui implique qu’il ne maîtrise plus les pouvoirs de la force). L’action se passe huit ans après la Bataille d’Endor qui signait au cinéma, à la fin de l’épisode VI, la chute de l’Empire et l’avènement de la Nouvelle République. Les Républicains, épaulés par les jedis, poursuivent sans relâche les derniers Impériaux à travers toute la galaxie. Luke Skywalker, qu’il est inutile de présenter, demande à son ancien camarade jedi Kyle Katarn et à Jan Ors, la compagne de ce dernier, de se rendre sur la planète Kejim, soupçonnée d’abriter des activités impériales, pour enquêter. Ils y découvrent que l’amiral Galak Fyyar, un ancien impérial, aidé par Desann, un jedi passé du côté obscur de la force, cherche à créer une armée pour renverser la Nouvelle République, en créant une armure faite d’un minerai appelé cortose, réputé résistant aux sabres lasers des jedis. Kyle et Jan partent ensuite sur la planète Artus Prime d’où proviendrait le fameux minerai. Les Impériaux y exploitent des prisonniers républicains réduits en esclavage. Alors que Kyle tente de les libérer, Jan se fait enlever par Desann et sa disciple Tavion. N’étant pas de taille à lutter, Kyle décide de redevenir un jedi afin de pouvoir affronter Desann et Tavion à l’aide des pouvoirs de la force. Il se rend dans la Vallée des Jedis pour retrouver la maîtrise de la force, puis à l’Académie Jedi pour récupérer son sabre laser conservé par Luke Skywalker. Peu après, Desann envahit la Vallée et insuffle dans les corps de ses soldats, déjà protégés par leur armure de cortose, les pouvoirs de la force afin d’en faire des jedis noirs. Je vous laisse imaginer la suite de l’histoire qui amène le joueur à visiter plusieurs planètes aux décors variés et aux ennemis de plus en plus puissants, jusqu’à l’affrontement final et un possible sauvetage de la belle.

Du point de vue du gameplay, le joueur n’a à sa disposition lors des premiers niveaux du jeu que des armes de tir, type blaster ou arbalète wookie (celle de Chewbacca dans les films), comme dans tout FPS classique. Donc rien d’extraordinaire au départ, si ce n’est le plaisir que l’on éprouve à dessouder du stormtrooper à la chaîne ! C’est lorsque Kyle acquiert les pouvoirs de la force et le sabre que le jeu déploie ses ailes. Pour qui a une âme de jedi, il est possible de parcourir le reste de l’aventure à l’aide de cette seule arme, en vue à la troisième personne. Évidemment, il ne s’agit pas d’escrime moderne puisque même si le sabre laser fonctionne basiquement comme un sabre de métal, Kyle peut également pendant les combats le lancer sur les ennemis à la manière d’un boomerang et exploiter la force pour accélérer, sauter très haut, repousser l’adversaire ou l’attirer à lui, l’étrangler ou le faire griller à l’aide des éclairs du côté obscur. Sans parler du pouvoir de guérison et de celui de persuasion, l’ensemble de ces pouvoirs n’étant accessible à leur maximum que dans les derniers niveaux du jeu. Toutefois, l’utilisation du sabre au corps à corps contre un jedi noir est un ravissement pour les escrimeurs que nous sommes, car le déplacement du faisceau dans l’espace se fait entièrement à l’aide de la souris. C’est donc véritablement la main du joueur qui contrôle la position exacte du sabre dans l’air et la destination des coups. La meilleure simulation d’escrime que je connaisse ! Voici deux images in-game montrant à quoi ressemble un duel au sabre laser dans Jedi Outcast et une attaque secondaire à l’aide du jet d’éclairs :

Jedi Knight : Jedi Academy peut être vu comme une extension de Jedi Outcast, bien qu’il soit possible de l’apprécier sans avoir joué à ce dernier. Il est souvent vu comme un add-on dans la mesure où le personnage que l’on y incarne dispose d’entrée du sabre laser et des pouvoirs de base de la force à leur intensité minimum. Ce personnage se nomme Jaden Korr. C’est un apprenti jedi (un padawan) qui débarque au début du jeu à l’Académie, sur Yavin IV, afin de suivre la formation dispensée par le maître Kyle Katarn, protagoniste promu de Jedi Outcast. Dès la première cinématique du jeu, l’Académie est attaquée par Tavion (la disciple de Desann déjà affrontée, mais pas tuée dans le jeu précédent), armée d’un étrange sceptre et protégée par des Impériaux. On apprend rapidement des bouches de Luke Skywalker et de Kyle Katarn que Tavion a pris le commandement d’un culte sith (siths est l’autre nom des jedis noirs dans la mythologie lucassienne) visant à réveiller le défunt et puissant seigneur sith Marka Ragnoss à l’aide du pouvoir de la force absorbé et concentré dans le sceptre de Tavion. Après une formation rapide à l’Académie, on se voit confier une longue série de missions sur toutes sortes de planètes (dont la planète Hoth de L’Empire Contre-attaque) au fil desquelles on en apprend davantage sur le culte tout en gagnant de nouveaux pouvoirs. Les ennemis sont très variés (on y croise par exemple plusieurs rancors, semblables à celui auquel Jabba donne ses prisonniers à boulotter dans Le Retour du Jedi) et les combats contre les jedis noirs très, très nombreux avec un système de combat amélioré par rapport à celui de Jedi Outcast et un aspect escrime encore plus riche et réaliste. Le jeu possède un côté RPG (jeu de rôle) assez développé puisque les pouvoirs n’évoluent pas d’eux-mêmes comme dans Jedi Outcast. Il faut ici choisir quels pouvoirs on souhaite développer entre chaque mission, le choix étant donné entre côté clair (guérison, persuasion, protection et absorption) et côté obscur (épuisement, foudre, poigne et rage) de la force. À peu près au milieu du jeu, il est possible de choisir entre tuer ou laisser en vie un camarade de l’Académie, Rosh Penin, passé du côté obscur. Si vous l’épargnez, il vous faudra à la fin du jeu affronter Tavion alors que si vous le tuez, vous passerez du côté obscur et il vous faudra non seulement affronter Tavion à la fin du jeu, mais aussi Kyle, ce qui corsera grandement les choses en plus d’être immoral ! Autre customisation possible : Jaden n’est pas forcément humain. Plusieurs races sont disponibles au début du jeu et le personnage peut être féminin. De même, la poignée du sabre et la couleur de son faisceau sont laissées au choix du joueur. En milieu de partie, on peut opter pour un second sabre ou pour un sabre à deux lames, le tout étant à nouveau personnalisable. Voici quelques images du jeu :

En somme, deux jeux passionnants pour tous les fans de Star Wars d’une part et pour tous les escrimeurs d’autre part (l’un n’excluant pas l’autre !). Une vraie simulation d’escrime moderne ne serait sûrement pas viable économiquement. Heureusement, quelques rares jeux permettent de compenser ce manque et d’étancher la soif vidéoludique des bretteurs que nous sommes. La série des Jedi Knight en est un très bon exemple, mais il en existe d’autres. Affaire à suivre donc dans de prochains articles…

Que la force soit avec vous !

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